vendredi 9 janvier 2009

Un parcours dévoilé

Persepolis
Réalisé par Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud

Le film d’animation Persepolis est une adaptation de la série BD homonyme, écrite et dessinée par Marjane Satrapi. L’histoire, inspirée par la jeunesse de la dessinatrice, débute en 1978, à Téhéran ; Marjane a alors huit ans. Elle est cajolée au sein d’une famille moderne et cultivée qui supporte avec tendresse ses débordements d’enthousiasme. C’est une enfant joyeuse et vive d’esprit qui n’hésite pas à se mêler des conversations politiques. Ce qui nous donne des scènes assez cocasses. Elle se rêve en prophète superhéros qui a réponse à tous les maux de la planète ; réponses commençant invariablement par «Tout le monde devra… » et «Il sera interdit de… ». Les enfants ont une capacité au mimétisme assez surprenante car souvent pleine de justesse ! Et lorsque sa grand-mère, dont Marjane est très proche, lui demande ce qu’elle compte faire pour que les vieilles femmes comme elle ne souffrent plus, celle-ci répond avec aplomb : « Ben ! Ce sera interdit ! ». Savoureux !

La petite fille suit attentivement les évènements qui mèneront à la révolution puis, à la chute du Chah d’Iran . L’exaltation laisse vite place à l’inquiétude car s’instaure une République islamique. Débute le temps des « commissaires de la révolution » qui contrôlent tenues et comportements. Marjane, qui doit porter le voile, se voit alors révolutionnaire. Elle se confectionne un joli sweat avec pour inscription au dos : « Punk is not ded » (non, non, pas d’erreur à « ded ») et s’achète des cassettes d’Iron Maiden vendues sous le manteau !
Avec la guerre contre l’Irak, il faut faire face aux bombardements, privations et disparitions de proches. La répression intérieure s’accentue. Bref, dans un contexte qui devient de plus en plus menaçant, l’esprit critique de Marjane pose problème. Pour la protéger, ses parents l’envoient à Vienne, en Autriche. A quatorze ans, Marjane découvre la liberté, l’amour mais, rapidement aussi, la solitude et la différence.

Le fait qu’il s’agisse d’un film d’animation n’enlève rien à l’intensité de l’histoire. Malgré un style assez minimaliste, les personnages ont énormément de relief et l’émotion nous gagne autant que face à des acteurs de chair et de sang. Personnellement, j’ai un faible pour le dessin épuré, exempt de détails superflus plombant l’essence du récit. La majorité du film étant des souvenirs de Marjane, il se déroule en noir et blanc, ce qui m’a encore plus fasciné. Comme pour la photo, il me semble que le noir et blanc met en avant l’aspect émotionnel d’un instant, d’une histoire.
Les dialogues sont riches d’enseignements sur cette période de l’histoire de l’Iran. Mais ils surprennent surtout par l’humour employé à montrer le ridicule d’une situation. Je pense notamment à l’intervention que Marjane fait à la fac, contrant le discours obscur des islamistes ! Un instant de lucidité exquis !Bref, un film instructif, drôle et surtout doué d’autodérision, un phénomène rare.

Marjane présentant son programme de prophète à sa grand-mère.

1 commentaire:

Little Cat a dit…

Il est vraiment génial ce film, j'en suis ressortie très émue!